UN HUB A TUNIS-CARTHAGE OU LES DIVAGATIONS DE L’ANCIEN REGIME
8 août 2011Plusieurs années durant, on nous a annoncé que l’aéroport Tunis-Carthage allait se transformer en Hub pour devenir une plate-forme régionale de correspondances, notamment entre l’Afrique subsaharienne et l’Europe d’une part et le Moyen-Orient d’autre part. Quelle belle initiative à inscrire au palmarès de ceux qui en ont eu cette idée géniale et qui ont osé rendre public une telle aberration !
Car déclarer, avec autant de simplicité, vouloir transformer un aéroport bâti il y a 39 ans – et amélioré il y a un peu plus d’une quinzaine d’années- en une plate-forme aérienne régionale performante relève tout bonnement du rêve, du fantasme, ou plus probablement de la manipulation des masses.
Pour mieux saisir la perspective, il est fondamental de comprendre que le principe du Hub, c’est de permettre de connecter des flux de trafic aérien avec des vagues de départs et d’arrivées réparties en différentes plages. Cette organisation a l’avantage d’offrir aux passagers un nombre de connexions et de correspondances en un laps de temps très court. Ce qui a pour conséquence de générer un flux de trafic énorme sur l’aéroport concerné, flux de trafic drainé par la compagnie aérienne partenaire qui y gagne en termes de remplissage de vols.
La course aux connections
Entre les grands aéroports européens, c’est la course au MCT (Minimum Connecting Time) et à celui qui réussit à offrir un temps de correspondance le plus court possible. Pour ce faire, il faut deux éléments fondamentaux : une compagnie aérienne en pleine expansion capable d’assumer un maillage de vols internationaux, et de l’autre une infrastructure performante étudiée en conséquence. Les exemples européens sont là pour témoigner de la pertinence de la méthode : Lufthansa s’est adossée aux opérateurs aéroportuaires fédéraux pour ses Hubs de Francfort (Fraport AG) et de Munich (Flughafen München GmbH), Air France s’est appuyée sur ADP pour ses Hubs de CDG et de Lyon St-Exupéry, idem pour KLM à Schiphol, British Airways à Heathrow, etc. En fait, il s’agit d’un partenariat gagnant-gagnant : l’exploitant d’aéroport investit en fonction des besoins spécifiques de sa compagnie partenaire et en retour, la compagnie garantit un niveau de trafic passagers suffisamment important pour rentabiliser les investissements consentis. A Paris CDG, le satellite S3 permet par exemple des correspondances de 15 minutes entre deux avions !
Sur un autre plan, la course au Hub se joue aussi en amont lors de la réservation sur les GDS (Amadeus, Sabre, Galileo, etc.). En effet, la compagnie offrant le MCT le plus court s’affiche automatiquement sur la première page du GDS et est donc privilégiée en termes de vente.
Un satellite qui a ses limites
Quid de la situation de l’aéroport Tunis-Carthage : le satellite actuel est certes efficace pour les vols de point à point qui caractérisent la nature du trafic de la compagnie nationale Tunisair et des autres compagnies qui desservent la destination. Point barre ! Ne parlons pas de l’infrastructure qui, en aucun cas, n’a été élaborée de sorte à en faire un Hub.
Transformer Tunis-Carthage en un Hub aérien ? C’est possible, à condition de détruire totalement les infrastructures actuelles et les refaire selon des normes conformes aux exigences du principe du Hub. Secundo, il est clair que le réseau de Tunisair n’est absolument pas apte à se lancer dans une politique de Hub. De plus, la compagnie a retardé la date de réception de ses appareils long-courriers et songe sérieusement à la fermeture de lignes ouvertes récemment et jugées non rentables. Ceci outre les problèmes de pollution sonore qui se poseraient pour les riverains de l’aéroport qui est bordé par des zones à forte concentration d’habitants. Par conséquent, un Hub à Tunis Carthage, ce sera quand les poules auront des dents !
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