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Touristes algériens : qu’a-t-on préparé pour les accueillir ?

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Sans le marché algérien, le secteur touristique tunisien perd déjà un tiers de ses clients. Après deux ans de fermeture des frontières entre les deux pays voisins, les professionnels sont-ils prêts à accueillir les flux de last-minute si, au niveau politique, la réouverture des passages frontaliers venait à être actée ?

Après un flux de touristes algériens sur la Tunisie suivant une courbe ascendante durant les années avant le Covid, pour atteindre un record d’à peu près 3 millions d’entrées de touristes algériens en 2019, l’épidémie est venue tout arrêter et remettre les compteurs à zéro.

Après plus de deux ans de la fermeture des frontières, le flou plane toujours sur la date de leur réouverture aux touristes vers les deux sens. Les professionnels impatients à cause du tarissement de leurs ressources pendant plus de deux ans, attendent cette décision. Toutefois, il était avant tout judicieux de savoir si les professionnels étaient réellement prêts pour accueillir les Algériens dans de bonnes conditions.

Pour débattre de cette question, la jeune association Tourism Labs 24 et DestinationTunisie.info ont organisé vendredi 10 juin à Yasmine Hammamet une conférence-débat sur le thème « Tourisme tuniso-algérien : comment aborder la saison » en présence de différents acteurs et professionnels du marché.

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Hédi Hamdi, président de l’association Tourism Labs 24, a rappelé lors de son intervention que la décision de fermer les frontières en mars 2020 était à l’époque légitime étant donné que les deux pays cherchaient à protéger leurs citoyens. « Aujourd’hui, l’épidémie s’est estompée et les pays en Europe sont en train de lever les restrictions avec un retour progressif pour le tourisme et le voyage. La Turquie vient de son côté de lever toutes les restrictions y compris les tests PCR », a-t-il poursuivi.

Si les choses bougent ailleurs, le statu quo est maintenu pour les deux pays voisins avec aucune visibilité.

Le président de Tourism Labs 24 a encore mis en exergue l’importance de ce marché pour les professionnels du tourisme et pour l’économie nationale avec près de 3 millions d’Algériens qui sont entrés en Tunisie en 2019, dont 93% par voie terrestre contre 7% seulement par voie aérienne.

« Leur absence durant les deux dernières années a beaucoup pesé sur des régions comme Nabeul et Hammamet. Il y a aussi Tabarka, Sousse, Djerba. Toutefois, cette année les choses ne vont pas dans le sens espéré, pourtant nous sommes à quelques semaines du pic estival », a-t-il précisé. Dans ce même registre, il est important de souligner que la réouverture des frontières profitent également à l’Algérie où 1,7 million de Tunisiens sont entrés dans ce pays en 2019.

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Le tourisme tunisien prêt à accueillir à bras ouverts les touristes algériens

Expliquant la particularité du marché algérien, il a indiqué que 30% de touristes algériens séjournent dans les hôtels tandis que 70% privilégient se loger ‘chez l’habitant’ . « Cela est aussi important car toute la communauté doit bénéficier des retombées économiques du secteur et l’argent qui rentre est injecté dans l’économie locale qui profite aux petits commerces, aux restaurants sans oublier le tourisme de santé », a-t-il détaillé.

Il a par ailleurs soulevé plusieurs questions par rapport à la préparation à la saison touristique, la disponibilité des chambres dans les hôtels et la qualité des services après deux ans de fermeture pour certaines unités hôtelières. Les professionnels du tourisme tunisiens et algériens sont aujourd’hui sur des charbons ardents, pour certains il s’agit même d’une question de survie étant donné qu’ils ne peuvent pas continuer une troisième année sans ressources. Si les frontières étaient ouvertes, il faudrait être préparé pour une saison de last minute par excellence.

Karim Gueddiche, directeur général-adjoint de Tunisair, est intervenu pour dire que même si le marché algérien représente 7%, il reste important pour le transporteur national, en rappelant que la réouverture des lignes aériennes entre les deux pays se fait d’une manière progressive et sur plusieurs vagues. Ils ont commencé par 7 vols par semaine pour le pavillon aérien tunisien et autant pour celui algérien. Maintenant, le nombre par semaine a été doublé. Néanmoins, il a considéré que ce nombre est en deçà des attentes notamment avec des frontières terrestres toujours fermées. Il a affirmé que Tunisair est disposée à mettre plus de capacités si les autorités algériennes l’autorisent.

Le directeur de la promotion de l’ONTT, Lotfi Mani, a de son côté dit que le marché algérien représente un tiers du total des entrées touristiques en Tunisie, et que l’aérien ne peut pas être une alternative à l’accès par voie terrestre même si le transporteur national redoublait ses capacités sur l’Algérie. « Au mois de mars 2019, avant la fermeture des frontières, nous enregistrions 400.000 entrées de touristes algériens contre seulement 36.000 entrées durant les premiers mois de l’année en cours. Il a affirmé que l’ONTT et les professionnels sont prêts à accueillir les touristes algériens à bras ouverts d’autant plus qu’au niveau des frontières, un travail a été fait pour améliorer les postes frontaliers en vue d’accueillir les Algériens dans de bonnes conditions.

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Quant à Dora Milad, présidente de la FTH (Fédération tunisienne de l’hôtellerie), elle a indiqué que les hôteliers sont prêts à accueillir les touristes algériens, en soulignant que leurs attentes concernant le taux d’occupation ne dépassent pas 50% même si certains hôtels sont encore fermés dont certains cas à cause de la fermeture des frontières algériennes. « C’est un marché important pour l’environnement économique car le séjour d’un Algérien est un peu plus long. Nous sommes prêts et si nécessaire à mettre à leur disposition de nouvelles capacités »

Un autre son de cloche est venu du président de l’Unih (Union nationale de l’industrie hôtelière), Afif Kchouk qui a appelé à ne pas prendre les choses à la légère, en considérant que les choses vont revenir à la normale après deux ans de Covid et de fermeture des frontières comme si rien ne s’était passé. « Il faut repenser le partenariat avec l’Algérie. Cette dernière attend beaucoup de nous », a-t-il affirmé.

Il faut repenser le partenariat avec l’Algérie

Deux scénarios

Pour Sobhi Saidi, vice-président de la FTAV (Fédération tunisienne des agences de voyages), les professionnels sont face à deux scénarii. Si les frontières étaient ouvertes, il y aura une forte demande sur la Tunisie.

Le challenge serait donc de gérer ces flux importants. Le deuxième scénario est de ne pas rouvrir les frontières. Dans ce cas de figure, la situation sera très difficile pour les professionnels, étant donné que le nombre de passagers qui vient en Tunisien par voie aérienne est très faible. Il a révélé aussi qu’il y a eu 48 demandes de charter par les agences de voyages algériennes, mais elles étaient toutes refusées par l’Aviation civile algérienne. « L’Algérie favorise actuellement le retour des Algériens résidents à l’étranger, qui ne sont pas rentrés depuis deux ans ». Il a par ailleurs soulevé d’autres questions en relation avec les prix qui seront appliqués en cas de réouverture des frontières, notamment avec l’épuisement de l’Early Booking.

48 demandes de charter par les agences de voyages algériennes, toutes refusées par l’Aviation civile algérienne

Dora Milad a répondu à cette question en expliquant que ce n’est pas la même chose de réserver 6 mois avant que réserver en last minute. Ceci est la loi du marché qui s’applique à tout le monde. « Les prix ne dépendent que de nous. Les T.O sont impliqués également. Ils décident parfois des promotions afin de remplir les vols. Pour cela, le touriste individuel paie parfois plus cher qu’un touriste qui vient dans le cadre d’un packaging via une agence de voyage ».

Les intervenants ont aussi considéré que le marché algérien est peu restructuré et qu’il s’agit d’un marché de Last Minute.

Slim Dimassi, président de la Fédération régionale de l’hôtellerie Skanès-Monastir, est revenu dans son intervention sur l’importance du marché algérien, en ajoutant  qu’il n’y a pas de problèmes de capacités même si certains marchés européens classiques sont en train de reprendre. « Nous sommes à 90% des hôtels en exploitation dont seulement 4 ou 5 hôtels sont remplis à 50% ».

A Tabarka où les professionnels dépendent encore plus du marché algérien, les intervenants ont dit qu’il y aura toujours de la place pour les Algériens. Toutefois, ils ont évoqué certaines faiblesses qui pourraient entraver le retour des Algériens comme l’absence des aires de repos et l’état du parc automobile réservé au tourisme.

Sami Aib, président-directeur général de CLICnGO, première centrale algérienne de réservation en ligne, qui était également présent, a commenté le débat en considérant que tout effort fourni pour améliorer les capacités aériennes demeure insignifiant étant donné que la majorité écrasante des Algériens entre par voies terrestres.

Pas de stratégie

En outre, il s’est demandé quels efforts ont été consentis pour fidéliser les touristes algériens, en considérant qu’il n’y a aucune réelle stratégie dans ce sens ou pour déterminer les objectifs de 2025 ou 2030 par rapport à ce marché ou afin d’analyser le client final et se remettre en cause par rapport aux expériences précédentes.

« Avons-nous pris en considération qu’il était le marché sauveur en 2011 et  2015 ? Durant le Covid, l’Algérien s’est retourné vers le marché local et le taux de satisfaction était spectaculaire. De plus, les professionnels égyptiens et turcs étaient présents pendants les deux dernières années en Algérie mais pas de Tunisiens qui restent dans leur zone de confort en attendent le retour naturel du marché », a-t-il indiqué et d’ajouter : «  Détrompez-vous, leur retour sera naturel et avec un rush avec la réouverture des frontière, mais une fois qu’il se stabilise nous constaterons un autre ranking qui est différent. Essayez de voir les choses différemment. La donne a changé et les résultats aussi », a-t-il conclu.

K.C

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