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Mehdi Houas, ministre du Commerce et du Tourisme (part. 2): « Il faut que les hôtels apprennent à  gérer les grèves »

Mehdi Houas, ministre du Commerce et du Tourisme (part. 2): « Il faut que les hôtels apprennent à  gérer les grèves »

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Deuxième partie de l’entretien accordé à  DestinationTunisie.info par le ministre du Tourisme avec quatre nouveaux thèmes abordés.

Les croisières de Sakhr Matri

« Le racket organisé par Sakhr Matri dans le secteur des croisières est catastrophique parce que l’on s’aperçoit qu’un croisiériste qui passait par La Goulette payait 5 euros de taxe par passager qui allaient directement dans sa poche alors qu’un croisiériste qui va à  Monaco paye 1,25 euro. J’ai des tas d’amis qui m’ont dit qu’ils avaient fait récemment une croisière mais qu’ils ne passaient pas par la Tunisie parce que leur croisiériste leur avait dit que ce n’était pas intéressant. Ils m’ont dit que quand ils descendaient dans une station, ils dépensaient 50 à  150 euros. Toute cette richesse là , qui était perdue, il va falloir qu’on la récupère. Le chantier est long ».

Le climat social dans le tourisme :

« J’ai deux façons de regarder la situation. Nous n’avions pas l’habitude en Tunisie de voir des grèves, de voir des manifestations, de voir des revendications sociales. Ce qui veut dire qu’il n’y avait pas dans les entreprises ou dans les hôtels les organisations pour répondre à  ces conflits et pour y répondre dans le cadre du dialogue. C’est l’image d’un pays qui est libre et qui en train de rentrer dans la démocratie. Pour moi, c’est un atout de vente. Il ne faut pas refuser le dialogue, il ne faut pas qu’on en arrive au conflit. Aujourd’hui, on y arrive parce que la demande est brutale et elle est le reflet de 23 ans et même de 30 ans (je rajouterai les 7 dernières années de Bourguiba) d’injustices et d’attentes. Il faut donc qu’on mette en place toute la logistique qui permette de l’intégrer et d’expliquer calmement que ces revendications doivent calmement, dans le temps, trouver réponse, mais pas de manière fortement immédiate pour ne pas massacrer le pays. La communication que l’on doit avoir avec l’étranger doit être sincère et transparente. Il faut que les infrastructures hôtelières apprennent à  gérer les grèves et qu’on ne ferme pas les hôtels en partant et en se disant que la situation se règlera d’elle-même. Nous avons décidé, la semaine dernière, au niveau du ministère, de créer une task force spéciale pour essayer de construire une méthodologie de gestion des conflits sociaux à  laquelle nous avons associé la fédération des hôteliers parce que ça s’administre, cela ne se fait pas de manière intuitive. Il faut des compétences qui n’existaient pas. Vous connaissez tous mon parcours et vous savez que j’étais à  Paris il y a moins de 6 semaines et que j’étais entrepreneur. Nous avons l’habitude de cela.».

Le marché allemand :

« Nous avons rencontré les professionnels et nous avons eu un discours et un dialogue francs, de businessmen. Je leur ai dit, cette année, personne ne va gagner, donc on ne sera pas dans une configuration win-win. Etre dans une configuration lost-lost, ce n’est peut être pas forcément bien, par contre, on peut leur dire qu’on va être dans une configuration invest-invest et on va commencer à  préparer 2012, 2013, 2014. Si on se met dans cet état d’esprit, il va falloir que les efforts soient communs et que l’on n’essaie pas de profiter l’un de l’autre. Vous, vous ne profitez pas de notre situation en demandant des efforts et du sponsoring que l’on ne saurait vous donner, ne nous comparez pas à  un pays qui ne nous ressemble pas parce que nous n’avons pas les mêmes moyens que lui, par contre, la Tunisie a sa place dans l’échiquier méditerranéen du tourisme et ce serait une perte pour vous que de la tuer. Donc, vous avez une responsabilité aussi pour la conserver en vie et, ensemble, on va y arriver pour construire l’avenir. C’est le message et je pense qu’il est passé vers les quatre tour-opérateurs allemands. Le deuxième message, c’est un message vers la population pour la rassurer pour qu’elle puisse spontanément aller booker et acheter son voyage sans avoir peur de la sécurité parce qu’on ne peut pas venir passer ses vacances en Tunisie si on a peur pour sa vie.

Le futur du tourisme tunisien :

« Il faudrait repenser le tourisme tunisien par une mise en valeur du patrimoine qui est exceptionnel et non mis en valeur. J’ai commencé à  travailler avec le ministre de la Culture et nous avons identifié une douzaine de sites que l’on peut lancer en quick win pour le printemps prochain, en les mettant en valeur de manière simple, avec des sons et lumières, en incitant la population locale à  créer un ou deux cafés, un ou deux restaurants, en proposant des parcours qui permettent d’aller à  la rencontre de l’artisanat. Je crois énormément au gîte rural, je crois énormément aux maisons de charme, je crois énormément au haut de gamme. Je ne comprends pas comment un touriste qui vient en Tunisie dépense 2,5 fois moins qu’un touriste qui va au Maroc. Il n’y a aucune raison scientifique pour expliquer cela. Il faudrait aussi une remise en avant d’un artisanat qui a été détruit. Il faudrait que l’on parle de la souffrance des artisans tunisiens, qui sont plus de 350.000, qui ont vu leur artisanat volé, dépouillé, massacré, concurrencé par des produits chinois et, pire encore, concurrencés par leurs propres produits fabriqués en Chine ».

Propos recueillis à  Berlin par
Hédi HAMDI
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