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Hébergement touristique alternatif : les promoteurs ne savent plus où donner de la tête

Hébergement touristique alternatif : les promoteurs ne savent plus où donner de la tête

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Maisons d’hôtes, hôtels de charme et gîtes ruraux sont de plus en plus la nouvelle tendance de l’hébergement touristique qui attire de nouvelles niches de touristes tunisiens et étrangers. Or, les investisseurs dans ce genre d’hébergement touristique alternatif sont souvent bloqués à cause d’une législation contraignante.

Entre ambigüités juridiques, multiplicité des vis-à-vis, absence d’un cahier des charges régissant l’activité et complexité des procédures administratives, l’investisseur dans l’hébergement touristique alternatif ne sait plus où donner de la tête. Sur plus de 2000 maisons d’hôtes, hôtels de charme et gîtes ruraux environ en Tunisie, seule une centaine est en règle. Ce maigre bilan ne reflète ni la réalité, ni les perspectives de la filière qui gagne progressivement en notoriété et attire de plus en plus de clients tunisiens et étrangers.

Pour débattre des principaux obstacles auxquels sont confrontés les professionnels de l’hébergement touristique alternatif et des contraintes bloquant aujourd’hui les investissements dans ce domaine, une table ronde sous le thème : «La situation des hébergements alternatifs en Tunisie» a été organisée le 23 avril par la Fédération interprofessionnelle du tourisme tunisien (FI2T) en partenariat avec l’Office national du tourisme tunisien (ONTT) et avec la participation des représentants des établissements d’hébergement touristique alternatif.

Vide ou flou juridique ?

« Y a-t-il un vide et un flou juridiques par rapport à l’octroi des agréments et l’exploitation des projets ? » C’est la première question posée lors de ce débat.  À cela, l’avocate Olfa Hachicha, représentante juridique de la FI2T, a tranché : «J’ai pu constater qu’il n’y a réellement pas de vide juridique étant donné que l’administration applique toujours le décret de 2013 et elle continue à octroyer des agréments. Toutefois, il y a bel et bien un flou juridique sur plusieurs niveaux et concernant plusieurs volets de l’application de la loi ». Ce flou s’est amplifié avec le décret de 2022 annonçant la suppression future des autorisations et son article 8 qui a évoqué une éventuelle élaboration d’un cahier des charges. «Cette situation a laissé les professionnels dans l’expectative depuis 2 ans».

Les investisseurs dans l’hébergement touristique alternatif sont confrontés à de nombreux problèmes au quotidien, que ce soit au niveau de la mise en place ou de l’exploitation du projet ; complexité des procédures administratives, multitude de vis-à-vis, (l’ONTT, le patrimoine, ministères de l’Agriculture, de l’Equipement, de l’Intérieur, des Affaires culturelles, des municipalités), lenteur administrative, etc. « Certains dossiers sont bloqués depuis 2 ans alors que l’accord préalable a un délai d’un an », a-t-elle indiqué.

L’administration n’est pas la seule responsable

Cependant, l’administration n’est pas la seule responsable de ces problèmes, toujours selon Olfa Hachicha, étant donné que le professionnel assume parfois une part de la responsabilité en se compliquant la tâche et en se créant des obstacles. «Certains entrepreneurs installent leurs projets sans consulter ni avoir les autorisations nécessaires, en se mettant ainsi hors des normes et des conditions exigées par la loi», a-t-elle ajouté.

Manque d’information

Le manque d’information et de clarification est un autre problème devant la création et l’exploitation d’un projet dans le tourisme alternatif soulevé par les professionnels. Il expose le propriétaire souvent à des sanctions. Outre donc un blocage à cause de l’indisponibilité de l’information, les opérateurs ont déploré le fait que de nombreux investisseurs faisaient l’objet de poursuites juridiques ou ont été arrêtés à cause d’une incompréhension du texte juridique ou de l’absence de coordination entre les ministères. Dans certains cas, l’entrepreneur se voit interdit de recevoir des étrangers dans sa maison d’hôtes alors que Hédi Chabâane, directeur central du Développement des Investissements à l’ONTT, soutient qu’aucun texte juridique ne le dit clairement. A cela s’ajoutent d’autres contraintes comme l’autorisation pour servir et vendre de l’alcool ou concernant les gîtes ruraux où la loi impose une superficie minimale de 20 ha, ce qui est jugé énorme par certains entrepreneurs.

Un vis-à-vis unique

Face à ce flou juridique, les professionnels ont fait valoir plusieurs propositions susceptibles de solutionner les différentes problématiques freinant l’investissement dans l’hébergement touristique alternatif. Pour le président de la Fi2T, Houssem Ben Azouz, la sortie de cette situation compliquée passe nécessairement par un partenariat public-privé afin d’éviter les mésententes. Toutefois, la principale revendication de tous les professionnels est de rester sous la tutelle du ministère du Tourisme et de l’avoir en tant que vis-à-vis unique.

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Houssem Ben Azouz, président de la Fi2T, et Olfa Hachicha, avocate.

Un contrôle en aval

Les intervenants ont également appelé à réviser le zonage du territoire (zones forestières, agricoles irriguées), qui bloque souvent l’octroi des agréments par le ministère de l’Agriculture, pour qu’il suive les évolutions mondiales et ne constitue plus un obstacle devant l’investissement dans l’hébergement alternatif. L’assouplissement des procédures est l’autre revendication des opérateurs pour encourager l’investissement dans la filière. Il s’agirait, par exemple, d’opter pour un contrôle en aval et non plus en amont pour la création des projets.

Cahier des charges commun

Ils ont revendiqué d’élaborer un cahier des charges commun qui serait signé par tous les ministères et les parties impliquées dans l’octroi des agréments, lequel permettra à tout nouvel investisseur d’entreprendre son projet sans avoir besoin d’autorisations préalables.

Quoi qu’il en soit, les représentants des hébergements alternatifs présents à la table ronde étaient d’accord pour dire que le blocage ne vient pas de l’ONTT qui a toutes les structures nécessaires pour accompagner et encadrer les investisseurs. D’ailleurs, Hédi Chabâane a rassuré les présents que l’ONTT œuvre pour changer les procédures et les simplifier. En ce qui concerne l’avancement dans le projet du cahier des charges, Mehdi Haloui, directeur de l’Investissement à l’ONTT a, de son côté, fait savoir que le gouvernement avait renvoyé au mois de novembre dernier le projet à l’ONTT pour d’autres observations. A cet effet, l’Office est actuellement en train de le réviser pour y introduire d’autres changements avant qu’il soit transféré de nouveau au gouvernement pour l’adopter.

Etude : état des lieux de l’hébergement alternatif

L’événement était également une occasion pour présenter une étude quantitative et qualitative de l’état des lieux de l’hébergement alternatif en Tunisie élaborée par le cabinet Emrhod Consulting. Il en ressort que la filière affiche un taux de pénétration de 9% des hébergements touristiques alternatifs et durables sur le marché local, qui lui-même représente plus de 30% du tourisme tunisien global. Cela démontre d’ailleurs la notoriété grandissante de la filière et la diversité de son offre.

L’enquête a permis également de sonder la perception des Tunisiens à l’égard de ces hébergements, en comprenant leurs motivations et les outils de réservations qu’ils utilisent afin d’évaluer les perspectives de croissance du marché. Les acteurs (propriétaires et gestionnaires), dont plus de 35% sont dans le secteur depuis plus de 4 ans, se sont aussi exprimés pour révéler que 78% de leurs clients sont des touristes et 71% de leurs clientèles des familles.

D’après cette étude, 39% des Tunisiens pensent que le prix d’une nuitée dans les maisons d’hôtes est abordable alors que 22% pensent que les prix sont relativement chers. D’autre part, 43% des Tunisiens s’orientent vers ce genre d’hébergement pour fêter leurs mariages et fiançailles alors que 44% préfèrent les hébergements alternatifs pour se retrouver entre amis et 52% pour se reposer.

Sur un autre plus, l’étude a révélé que 70% environ des propriétaires et des gestionnaires d’hébergement alternatifs ne veulent pas s’engager dans une démarche administrative étant donné la complexité de la tâche et la multitude des vis-à-vis.

Kemel CHEBBI

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