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Interview Mossaab Battikh, PDG de Magic Hotels & Resorts

Interview Mossaab Battikh, PDG de Magic Hotels & Resorts

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Avec 21 établissements en gestion dont 17 en Tunisie, Magic Hotels & Resorts s’est de toute évidence imposé comme un acteur majeur du tourisme en Tunisie depuis ces 4 dernières années. Derrière cette montée en puissance, une vision et des convictions. Entretien à bâtons rompus avec son premier responsable, Mossaab Battikh, qui en préside les destinées depuis 2006.

Dans les milieux touristiques, on a souvent tendance à faire des amalgames entre Magic Life et Magic Hotels. Si vous pouviez-nous expliquer le lien entre les deux et la naissance de la seconde entité ?

Nos débuts remontent à l’année 1997 avec la marque Magic Life qui est un brand hôtelier (à l’époque austro-tuniso-turc) qui a exploité l’hôtel Manar à Hammamet et l’Africana à Yasmine Hammamet. En 2004, Magic Life a été rachetée par le groupe TUI. Quand j’ai été nommé PDG en 2006 (j’avais 28 ans et c’était pour moi un vrai challenge), nous gérions alors 5 hôtels et 2 golfs. Jusqu’à 2010, je dois reconnaître que le business ne marchait pas très bien et que l’enseigne Magic Life connaissait des difficultés. Nous avons dû rendre certains hôtels et les parcours de golf (car nous n’avions pas remporté l’appel d’offres pour des raisons que beaucoup se rappellent).

En 2011, après la révolution, il y a eu une poussée du marché anglais et c’est là que l’hôtel Manar est devenu « Holiday Village ». Il y a eu comme un effet boule de neige positif et TUI nous a proposé d’autres brands en Tunisie et en Egypte. Nous étions connus sous le nom Magic Life et pour rester dans l’esprit du groupe et bénéficier de sa notoriété, nous avons choisi Magic Hotels pour notre division.

La révolution nous a finalement été favorable d’autant que nous avons augmenté le nombre de nos hôtels. Nous avons été les premiers par exemple à lancer le concept « Adults Only » sur l’hôtel Scheherazade à Sousse. A l’origine, le concept s’appelait « Thomson Couples » et nous a fait un peu peur au début car nous étions plutôt habitués à gérer des hôtels « familles ». Le concept a finalement réussi et cette réussite nous a poussés à mesurer son importance. On a donc réussi à imposer ce modèle de business alors qu’en Tunisie, on maîtrise surtout le All In et que 4 T.O sur 5 le demandent. Nous avons continué en 2015 avec un autre « Adults Only » à Marrakech sur l’hôtel Medina Garden.

Vous êtes certainement l’un des rares professionnels à affirmer que la révolution a été profitable au tourisme. Ceci malgré les différentes crises vécues par le secteur depuis 2001 ?

En juin 2015, ce fut pourtant le cauchemar. Nos hôtels étaient pleins à 99%. Les Anglais étaient nos premiers clients. Nous n’avons pas su les protéger. Mais c’est en période de problèmes que naît la créativité. Nous avons créé alors une plate-forme Internet destinée au marché local et algérien auxquels nous n’avions pas donné jusque-là l’importance qu’il faut. Dans la foulée, nous avons repris un hôtel à Tabarka et un autre Tozeur alors que plusieurs hôtels étaient à la peine à Hammamet. Le tourisme balnéaire est facile. Aller à Tabarka et à Tozeur, c’est plus difficile. Nous en avons déduis que les attentes de nos clients n’étaient pas uniquement sur le balnéaire mais sur le service. Ce sont deux hôtels qui sont pour nous aujourd’hui une fierté.

A partir de 2017, il y a eu de nouvelles orientations sur d’autres marchés et avons mis en place de nouveaux partenariats avec l’agence Voyages 2000 sur le marché russe qui demandait beaucoup de chambres. Ce marché nous a permis d’étirer plus longtemps la période d’ouverture des hôtels et donc de maintenir plus longtemps le personnel et maîtriser la qualité.

Vous en êtes à 7 établissements sur Djerba, 5 avec un brand et deux sans marque. Quelle est votre stratégie sur l’île ?

Djerba est la première destination touristique en Tunisie en termes de nuitées grâce à l’aérien. Suite à la demande de nos partenaires, nous avons été obligés d’augmenter nos capacités. De plus sur Djerba, nous pouvons parler de 10 mois d’activité, ce qui est un avantage par rapport au reste des régions.

« La crise nous a montré que plus l’hôtel est international, plus il a une capacité de résistance »

La crise nous a appris que les hôtels qui ont le plus de clientèle diversifiée (6 à 7 nationalités), malgré les contraintes, représentent une sécurité en cas de crise sur un des marchés. La crise nous a montré que plus l’hôtel est international, plus il a une capacité de résistance. Et pour être à l’abri, il faut être partout.

Vous venez de reprendre l’Ulysse Palace à Djerba. Pourquoi cet hôtel tout d’abord ? Ensuite, vous avez réussi au cours de l’hiver dernier à le rénover en seulement quelques mois. Comment vous y prenez-vous ?

L’Ulysse est un hôtel mythique, un must et nous sommes heureux de le replacer dans sa véritable image. Notre collaboration avec le groupe Chaibi sur Djerba date de 2015 avec l’hôtel Djerba Mare (exploité sous le brand Marmara). C’est une collaboration réussie. De notre côté, nous ne pouvions plus satisfaire la demande sur l’île. Nous avons convenu d’une rénovation ciblée avec optimisation de l’investissement en 6 mois et 0 jour de retard. Faire la rénovation d’anciens hôtels n’est pas évidente car nous avons en parallèle des attentes en termes d’exploitation. Mais nous avons relevé le défi encore une fois et réussi la rénovation durant les 6 mois d’hiver. C’est un engagement que nous prenons avec nos partenaires. Notre expérience nous permet aujourd’hui d’être performants et au point dans les délais fixés.

Comment se passe justement la collaboration avec les autres propriétaires des hôtels en Tunisie ?

Notre business-model, c’est la location d’hôtels sur de longues durées. A Hammamet, aujourd’hui, ce sont 22 années de confiance sur l’hôtel Manar avec la famille Fakhfakh et surtout feu Mokhtar Fakhfakh qui était une sommité. Sur les Palm Beach également, le regretté Mongi Loukil est, pour moi, l’un des plus grands hôteliers que la Tunisie ait connu. Les hôtels Palm Beach sont parmi les meilleurs en Tunisie, dont celui de Tozeur. Je citerai aussi Jilani Attia, Jean Claude Vella… On ne loue pas un hôtel juste pour le louer. En période de crise, on s’est mis autour d’une table et on a pu stabiliser la relation. Nous avons fait la même chose avec les banques notamment pour honorer nos engagements. Je dois au passage saluer René Trabelsi. Nous avons eu de bons ministres mais lui a bien réagi aux derniers problèmes, il est toujours joignable.

Ceci étant, votre politique tarifaire est quelquefois mise à l’index par certains. Que diriez-vous à vos détracteurs ?

Le bradage ne nous ramène pas les bons clients. Nos prix sont élevés parce qu’il y a une offre et une reconnaissance de nos clients par rapport à cette offre. Notre slogan est « Our promise, you will come back » car nous savons que nos clients reviendront parce qu’ils auront été satisfaits, grâce aussi à nos équipes. Nous avons un taux de revenants très important qui peut atteindre jusqu’à 70% dans certains hôtels. Nous avons des clients qui choisissent leur chambre 6 ou 7 mois à l’avance. Ils sont sûrs de l’expérience qu’ils vont se voir offrir et nous anticipons sur leur retour.

Un mot sur votre politique de ressources humaines ?

Nous avons créé un sens de l’appartenance à l’entreprise basé sur l’honnêteté, l’engagement et les compétences. En période de crise, c’est l’engagement du personnel qui nous a encouragés à persévérer. Nous avons actuellement 6000 collaborateurs dont 50% à plein temps et 50% de semi-saisonniers finalement car nous essayons d’étirer la saison 8 mois sur 12 et nous prenons en considération les critères sociaux de ces collaborateurs pendant les périodes de fermeture ou d’activité réduite. Sinon, nous avons une véritable académie Magic Hotels où l’on peut gravir rapidement les échelons en interne. Au Maroc où nous avons deux hôtels, 50% des cadres sont Tunisiens. Il y a beaucoup de rotation de staff en hautes saisons entre Egypte, Maroc et Tunisie.

Propos recueillis par Hédi HAMDI

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