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Lettre ouverte à Jamel Gamra, nouveau ministre du Tourisme

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Monsieur Gamra, l’annonce de votre nomination au poste de ministre du Tourisme est tombée alors qu’un grand nombre d’opérateurs tunisiens du tourisme se trouvait à Berlin pour prendre part au principal salon touristique au monde, l’ITB.

J’étais parmi eux et autant vous le dire en toute franchise, la nouvelle a laissé les présents incrédules et n’a suscité que des haussements d’épaules ou des moues affligées.

Par ailleurs, il se trouve que sur place et pour la première fois, la Tunisie n’était pas représentée par son ministre du Tourisme, ce qui n’a pas échappé à  certains partenaires étrangers de nous faire la remarque, quelquefois sans arrière-pensée, mais souvent aussi pour tenter de prendre le pouls de la situation politique de notre pays.

A quelques encablures de notre stand national (300 m²), celui des Egyptiens occupait à  lui seul un pavillon complet du salon ! Et aux côtés de leur ministre du Tourisme, trônait un responsable dont la longueur de la barbe est sans aucun doute au moins égale à la haute fonction qu’il occupe dans son pays. Si la vue de cet individu a fait redresser les cheveux de certains de nos compatriotes, j’y ai personnellement vu au contraire un message à très forte symbolique à l’égard de la communauté touristique internationale présente à cette manifestation : au pays des Pharaons en pleine tourmente post-révolutionnaire, même les courants religieux les plus extrêmes soutiennent la cause touristique de leur pays.

Monsieur le Ministre,

Mabrouk pour votre nomination et soyez le bienvenu dans la grande famille du tourisme. Quand bien même un certain nombre de Tunisiens n’accordent pas le moindre crédit au gouvernement auquel vous appartenez (je ne vous apprends rien), il se trouve que dans la communauté des professionnels du tourisme -que vous allez avoir à côtoyer dans les prochains jours et pour toute la période de votre mandat, aussi court soit-il- la flamme de l’espoir à votre endroit n’est pas éteinte, du moins pas totalement. Déjà, dans les rangs des agences de voyages, votre visage est familier puisque certains ont eu le privilège de faire votre connaissance en octobre dernier pour le congrès de la FTAV à Istanbul et au cours duquel vous aviez fait bonne impression lors d’un speech. C’est l’image que gardent de vous les personnes présentes ce jour-là. Elles espèrent simplement ne pas s’être trompées sur la nature de l’Homme.

En tant qu’ingénieur en transport maritime et, de surcroît, ancien PDG de la CTN, vous avez sans aucun doute l’expérience de la navigation en eaux troubles. Dans le tourisme, vous arrivez justement en pleine tempête. Avant d’accepter la mission qui vous a été confiée, je suppose que vous avez consulté le baromètre du secteur et constaté qu’il virait de bord dangereusement.

Soyons clair : pour la période à venir, nul n’attend de vous que vous révolutionniez le tourisme tunisien et, de toute façon, vous n’aurez ni le temps ni les moyens de résoudre des problèmes que le secteur traine comme des boulets de canons depuis au moins l’année 1990. Aujourd’hui, on attend de vous au moins deux choses que nous allons résumer comme suit, en espérant que vous pourrez aussi lire entre les lignes :

 1) que lors des conseils des ministres, vous frappiez du poing sur la table pour défendre les intérêts du secteur dont vous avez la charge ainsi que les intérêts de ceux qui y travaillent sans succomber aux sirènes partisanes.

 2) que vous participiez à rassurer les prescripteurs de voyages étrangers qui manquent de visibilité sur notre destination. Ils ont besoin de nous au même titre que nous avons besoin d’eux, mais de belles paroles, même imprégnées de miel, ne seront pas de trop dans le contexte actuel. Vous devrez toutefois user de beaucoup de diplomatie et de franchise car ces gens là sont loin d’être dupes et connaissent la Tunisie et les Tunisiens autant que vous et moi.

Monsieur le Ministre,

Le paquebot tourisme fuit de toute part, victime collatérale de la situation générale du pays et d’une conjonction d’événements qui ont provoqué un effet boule de neige. Pour éviter le naufrage, votre mission consistera à colmater les brèches. Mais seul, vous n’y arriverez pas et vous aurez besoin de ceux qui travaillent sur le terrain. Ne perdez pas de vue que les touristes ne viennent pas au 1, avenue Mohamed V. Ils vont dans les hôtels via les véhicules des agences de voyages. Ne faites pas cavalier seul, ces opérateurs ont l’expérience et le recul par rapport à la situation que nul parmi vos derniers prédécesseurs n’avait au départ et a cru avoir à l’arrivée.

Et puis, il y a également ce lourd passif que vous a légué votre prédécesseur immédiat -que d’ailleurs peu de personnes regretteront, aussi bien dans les rangs des professionnels qu’au sein de l’administration. Alors, pour ne pas faire comme lui, dès votre prise de fonction officielle, œuvrez à ce que l’on vous regrette le jour où votre mandat arrivera à son terme.

Hédi HAMDI
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