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Tourisme en zone rouge : le sud tunisien vous salue bien

Tourisme en zone rouge : le sud tunisien vous salue bien

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Un convoi d’une trentaine de 4×4 s’ébranle en cortège à  la sortie de Tozeur. Direction, le Grand Sud, celui-là  même que les chancelleries occidentales ont décidé de décréter zone rouge. La caravane franchit le Chott Djérid, sans manquer d’effectuer une petite pause photos en cours de route. Elle traverse ensuite Souk Lahad, Kébili, puis Douz. Là , on met pied à  terre pour se dégourdir les jambes, pour se rafraîchir dans l’un des [quelques] hôtels qui résiste encore tant bien que mal à  la crise touristique ambiante en ville. Après ce brin de toilette, on rembarque pour affronter les pistes. La boussole affiche plein sud. A bord des véhicules, un groupe de 67 journalistes de 13 pays européens invités par l’ONTT dans le cadre d’une opération de relations publiques. Sauf que cette fois, il ne s’agit pas d’une action traditionnelle, mais d’une «action coup de poing» que l’administration du Tourisme avait prévue initialement pour le mois de janvier, mais qu’elle avait dû reporter à  cause des développements sécuritaires et politiques dans le pays. Inviter des journalistes et des leaders d’opinion pour les emmener là  où ils ne devraient théoriquement pas poser le pied : en pleine zone rouge, sur le territoire présumé des vilains terroristes à  la barbe hirsute qui menaceraient à  tout moment de traverser la frontière ouest tunisienne pour venir déranger les gentils touristes en quête d’exotisme saharien. Mais à  peine engagé sur la piste, le ton est donné: le convoi croise deux véhicules tous-terrains avec une plaque d’immatriculation hollandaise émergeant tout juste des profondeurs du désert. «Des passionnés comme on en voit régulièrement» commente notre chauffeur qui connaît la région dans ses moindres recoins. « Nous recevons encore régulièrement des rallyes autos-motos, et d’ailleurs, nous en avons un très important dans quelques jours » renchérit Anouar Chettoui, commissaire régional au Tourisme de Kébili.

Armés de leurs caméras, appareils photos, micros et dictaphones, les journalistes de TV5 Monde, du Nouvel Observateur France, du journal autrichien Society, ou encore du Neue Zürcher Zeitung suisse, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, en espadrilles ou en chaussures de marche, scrutent les immenses étendues de sable, les magnifiques dunes qui sinuent sous les rayons du soleil. Certes, l’encadrement est significatif. La Garde nationale escorte les véhicules touristiques, comme pour dire qu’en leur présence, il n’y a rien à  craindre. La Protection civile de Douz a même réquisitionné une ambulance 4×4 qui ne redoute ni le sable ni l’ensablement. «C’est un acquis pour nous et pour la zone car avant la révolution, nous n’étions pas équipés» nous avoue un agent. Maintenant, nous pouvons intervenir en cas de problème». Car dans cette immensité naturelle, les «mordus» du désert n’ont pas totalement fui la zone et continuent de l’arpenter en long et en large. C’est plutôt la clientèle traditionnelle des agences MICE et les excursionnistes qui ne viennent plus.

Où sont les vilains terroristes ?

Ali Abdelmoula, patron de l’une des plus anciennes agences de voyages de la région, n’en démord pas : «le fait d’avoir placé la région en zone rouge nous a fait beaucoup de tort. Nous savons tous ici que c’est impossible que quelqu’un traverse la frontière sans se faire repérer. Le terrain est plat, il n’y a ni montagnes ni forêt où [ils] pourraient se cacher. Et c’est la même chose de l’autre côté, en Algérie, c’est aussi le désert. Tous les jours, un avion de l’Armée nationale effectue un vol de reconnaissance et serait capable de repérer immédiatement même un sachet en plastique au sol» explique-t-il. Plus encore, on sait que dans les environs de Douz, les hommes de la région connaissent tous les secrets du désert. Ils confirment qu’il n’est pas donné au premier venu de se déplacer sur ces terres hostiles. Eux connaissent les pistes et les accès ; au moindre mouvement suspect, ils donneraient tout de suite l’alerte. D’ailleurs, les postes de contrôle de la Garde nationale dans la région sont établis à  intervalles réguliers. Le parc national de Jebil, situé lui aussi en plein désert, est occupé en permanence par des agents du ministère de l’Agriculture. Et dans notre chevauchée vers Timbaïne, destination finale des journalistes invités de l’ONTT, on aperçoit au loin des véhicules blindés de l’Armée nationale, postés au pied d’une dune, en toute discrétion. Dans cette zone frontalière, leur absence nous aurait au contraire surpris.

Au pied du mont Timbaïne, le Camp Mars. Riadh Mnif, propriétaire des lieux, en a fait un campement pour les touristes sur un site parfaitement inédit ; non pas pour ceux qui ne peuvent se passer de leur petit confort quotidien mais pour ceux qui aiment l’aventure et qui ne craignent pas de dormir avec du sable dans leurs chaussettes. «Nous sommes ouverts de septembre à  mai de manière générale et malgré ce qui s’est passé, nous n’avons jamais fermé, à  part en janvier 2011. Nous continuons de recevoir des clients et nous répondons à  leurs demandes spéciales pour des prestations ici ou ailleurs» (en pointant du doigt l’immense dune qui surplombe le camp). Si les clients sont encore là , c’est plutôt leur nombre qui a énormément baissé. Les entreprises européennes, qui faisaient auparavant de ces contrées leur terrain favori pour leurs incentives professionnels, ont totalement disparu. Heureusement qu’il reste encore des irréductibles et surtout des revenants que le diktat des chancelleries occidentales n’impressionne guère. Car du rouge, ils n’en auront finalement vu que sur les tenues qu’arborent les troupes de musique folklorique locale.

 Hédi HAMDI
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