Quand les Turcs de la TURSAB inspirent les Tunisiens de la FTAV
2 octobre 2012Pour son premier congrès international, la Fédération tunisienne des agences de voyages (FTAV) a choisi Istanbul. Du 27 au 29 septembre, elle a réuni 165 participants qu’elle a emmenés pour un voyage moins d’agrément que de travail.
Que sont allés chercher les agents de voyages tunisiens de la FTAV en Turquie la semaine dernière ? De toute évidence de l’inspiration et des idées neuves.
L’événement était d’ailleurs placé sous un thème on ne peut plus sérieux et très révélateur de l’objectif assigné : « échanges d’expériences et de savoir-faire dans le tourisme méditerranéen ». Le but de la FTAV était clair et sans ambages : « aller voir de plus près comment les Turcs ont réussi à faire de leur association des agences de voyages, la TURSAB, une structure aussi forte et aussi influente dans la gestion des affaires touristiques de son pays ». La délégation tunisienne n’est pas restée sur sa faim, loin s’en faut.
Du très beau monde à Istanbul
Pour son congrès, la FTAV n’a pas fait les choses qu’à moitié. En plus de son bureau directeur et une partie de ses adhérents, elle n’a pas manqué de convier également ses partenaires. Répondant à l’invitation de son président, Mohamed Ali Toumi, nombre de personnalités du secteur –et non des moindres- ont fait le déplacement à Istanbul spécialement pour la circonstance : d’une part les responsables de l’administration du Tourisme, en tête desquels le ministre, Elyès Fakhfakh, accompagné du directeur général de l’ONTT, Habib Ammar. D’autre part, Mohamed Belajouza, président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), ainsi que Adel Boussarsar et Slaheddine Glenza, anciens présidents et présidents d’honneur de la FTAV (qui faisaient là une nouvelle apparition publique très remarquée). Egalement du voyage, plusieurs hauts responsables d’entreprises publiques : Moez Boujmil, PDG de la SNR (Montazah Gammarth), Jamel Gamra, PDG de la Compagnie tunisienne de navigation (CTN), Khaled Chelly, DGA de Tunisair et DG de Tunisair Express, Khaled Farah, DG d’Amadeus Tunisie, ou encore Faouzi Kaâbachi, directeur de la délégation générale de Tunisair, auxquels se sont adjoints les représentants locaux de Tunisair (Moez Ben Rejeb) et de l’ONTT (Mohamed Bachar -pour sa dernière opération sur place- et Ahmed Kalboussi , son tout nouveau remplaçant sur le marché). La présence de Metin Gözüaçik, directeur régional de Turkish Airlines pour la Tunisie, n’est pas non plus passée inaperçue.
Le modèle turc
La FTAV est allée en Turquie sans complexe, consciente qu’elle allait s’enquérir auprès de ses confrères locaux d’un modèle qui a fait ses preuves en termes d’efficacité. « Ce congrès marque le lancement d’une nouvelle ère entre les deux corporations » a indiqué Mohamed Ali Toumi.
La TURSAB a été créée 8 ans après la FTAV, soit en 1972, avec 200 adhérents au départ. Elle en compte à ce jour exactement 6366. Adhérer à la TURSAB est une obligation pour les agences de voyages en Turquie. Sans cette adhésion, l’administration du Tourisme ne délivre pas d’autorisation d’exercer. Et pour créer une agence de voyages en Turquie, le capital requis est de 5000 euros (soit un peu plus de 10.000 dinars), contre 100.000 dinars nécessaires en Tunisie pour l’obtention d’une licence A (tourisme) ou 30.000 dinars pour une licence B (billetterie aérienne).
Cependant à la TURSAB , on exige des nouvelles agences l’équivalent de 15.000 euros comme « ticket d’entrée au club ». Ensuite, les cotisations annuelles y sont de 600 euros. Ce qui fait que la TURSAB dispose de fonds conséquents. Mais ce ne sont pas les recettes provenant de ses adhérents qui font d’elle un organisme aussi influent. En réalité, la TàœRSAB a d’autres sources de financement. La délégation tunisienne de la FTAV à Istanbul a en effet appris –non sans étonnement – que son homologue turque disposait d’un droit de gestion sur 52 musées dans le pays et en percevait les recettes ! D’ailleurs, sur les 600 employés que compte la TURSAB , 450 sont affectés aux guichets de ces musées. Sur un autre plan, l’association turque organise annuellement un salon de tourisme intitulé « Travel Turkey » à Izmir, ainsi qu’un « Shopping Fest ». De même qu’elle est actionnaire dans des centres de congrès et qu’elle se prépare à ouvrir un lycée professionnel qui prodiguera aux adhérents des formations continues dans des domaines qui les concernent tels que les langues étrangères, la formation aux GDS, la sensibilisation à la sécurité, etc. Ceci en plus de l’organisation de conférences, notamment sur le tourisme culturel à l’intérieur du pays (« pour un partage équitable des revenus touristiques entre les régions ») ou encore la publication régulière de livres et d’un magazine professionnel mensuel.
Des missions de contrôle et de régulation
Mais le rôle de la TURSAB ne s’arrête pas là : elle est chargée de l’inspection du tourisme dans le pays. Concrètement, l’association signale à l’administration locale du Tourisme toute défaillance ou tout écart dans le secteur et a le pouvoir, via un conseil de discipline, de demander des sanctions, voire la suppression de la licence de ceux qui n’auraient pas respecté la loi ou la déontologie de la profession. « Nous inspectons et nous régulons également le tourisme dans notre pays » confirme un représentant turc à ses confrères tunisiens. A ce titre, il est surprenant d’apprendre que des membres de la TURSAB accompagnent la police sur les routes pour contrôler les véhicules touristiques !
Parmi les autres missions qui lui sont affectées, l’association turque des agences de voyages est directement impliquée dans la mise en place des stratégies opérationnelles en rapport avec le tourisme. « Nous avons des stratégies qui s’adaptent à la réalité du pays » tient à souligner au passage le représentant de la TURSAB à son auditoire tunisien. Plus important encore, elle a également la charge de « sensibiliser le peuple au tourisme ».
Pour le commun des agents de voyages tunisiens, le modèle de la TURSAB a donc de quoi surprendre tant il diffère dans sa philosophie et dans sa pratique de celui de la FTAV. Les chiffres du tourisme de ce pays sont également la preuve tangible d’une success-story indéniable. Car il y a 10 ans, la Turquie ne recevait « que » 13,2 millions de touristes par an. En 2011, elle en a reçu 31,4 millions, lesquels ont généré la bagatelle de 23 milliards de dollars de revenus, propulsant par la même occasion le pays au 6e rang des destinations touristiques internationales. Et pourtant, la Turquie connaît également des déboires en tous genres et n’échappe pas à la conjoncture régionale. La guerre à ses frontières (en Syrie) et les tensions extrêmes entre son voisin iranien et l’Occident ne semblent pas affecter pour autant l’image du pays, lequel s’apprête à finir l’année en cours en hausse avec, à la clé, 32 millions de touristes attendus pour 2012.
Hédi HAMDI
Envoyé spécial à Istanbul
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