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Agences de voyages : «derrière chaque dossier, une vipère»

Agences de voyages : «derrière chaque dossier, une vipère»

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Les agents de voyages tunisiens le crient sur tous les toits : leur secteur est très mal en point, leur profession est en danger. Ce cri d’alarme, relayé par la FTAV, leur fédération de tutelle, s’est de toute évidence amplifié ces derniers jours. Une goutte a, semble-t-il, fait déborder le vase.

La communauté des agences de voyages en Tunisie se porte très mal et ne s’en cache pas. Aucune niche d’activité ne semble épargnée, à  tel point que la Fédération tunisienne des agences de voyages (FTAV) n’hésite pas aujourd’hui à  évoquer les termes de banqueroute pour les entreprises et de chômage pour les salariés du secteur. Fragilisées par une année touristique 2011 calamiteuse, les agences se disent aujourd’hui incapables de faire face aux pressions administratives qui s’abattent de toutes parts. Lors d’une réunion de crise qui a rassemblé pas moins de 250 agents de voyages le 28 janvier à  Gammarth (photo), le président de la FTAV, Mohamed Ali Toumi, évoquant les problèmes rencontrés par son bureau depuis son élection en juin 2011, a déclaré « avoir trouvé une vipère cachée derrière chaque dossier », reprenant ainsi une formule utilisée par l’ancien Premier ministre pour exprimer la masse de problèmes en suspend. Mais pourquoi cette sonnette d’alarme justement aujourd’hui ?

La goutte qui a fait déborder le vase

La principale préoccupation des agences de voyages concerne aujourd’hui la « caution ONTT ». En effet, l’Office national du tourisme tunisien vient d’exiger des agences de voyages le paiement d’une nouvelle caution d’un montant de 50.000 DT pour les agences de catégorie A et de 25.000 DT pour les agences de catégorie B et ce conformément à  un décret qui remonte à  l’année 1973. Dernier délai de régularisation : le 31 janvier 2012. Au vu de leur situation financière, les agences sont bien évidemment incapables de s’en acquitter. Théoriquement, elles seront donc passibles de fermeture administrative le 1er février. Mais pourquoi l’ONTT a-t-il ressorti ce décret aujourd’hui ? Les agences se posent la question. La réalité est que depuis 2006, un compromis avait été trouvé entre l’administration et la FTAV pour la mise en place d’un fonds de garantie solidaire d’un montant de 100.000 DT bloqués sur un compte bancaire. Or, deux faillites retentissantes d’agences de voyages ont été recensées ces derniers temps, la première laissant des impayés de 17.500 DT et la seconde de 41.000 DT. En foi de quoi, la caution solidaire de la FTAV n’est plus en mesure de couvrir le risque de faillite des agences. Et, paraît-il, aucune compagnie d’assurance n’a encore accepté de couvrir le risque. Face à  cette situation, la FTAV va donc demander un délai supplémentaire de deux mois à  l’ONTT et a lancé un appel d’offres auprès des compagnies d’assurances de la place afin de mettre en place un mécanisme qui soit à  la fois durable et règlementaire.

Délais supplémentaires

La FTAV a besoin de plus de temps, c’est un fait. Et pas seulement avec l’ONTT. Pour préserver les emplois dans le secteur, elle en appelle aux autorités (notamment ministères des Finances et des Affaires sociales) afin d’obtenir –non pas une exonération – mais un report d’échéances pour le règlement des cotisations sociales et fiscales. Pour les patrons d’agences, cela permettra de maintenir les salaires des employés en cette période de disette, en espérant une reprise de l’activité touristique d’ici l’été. Autre délai sollicité, celui auprès des compagnies de Leasing. Plusieurs agences de voyages (notamment dans la région du Sud-Ouest, où la crise du tourisme a été plus aigüe) sont en effet dans l’incapacité de payer leurs échéances financières à  l’égard des compagnies qui ont financé l’achat de leur parc roulant. Certaines en ont déjà  fait les frais et vus leur(s) véhicule(s) confisqué(s).

Dans les rangs des professionnels, toutes ces mesures, même si elles venaient à  être mises en application, sont insuffisantes. « Il faut créer un crédit de crise pour les agences de voyages » propose Samir Bellazrak, patron de l’agence Must Travel à  Tunis. Quant à  Yassine Khadraoui, directeur général de l’agence Tunisia Plus Services basée à  Sousse, il évoque littéralement un « complot contre l’agent de voyages que l’on attaque à  coups de règlementations ». D’où sa proposition de saisir le tribunal administratif pour rétablir la communauté des agences de voyages dans son bon droit.

Des problèmes qui empoisonnent la profession

Cela ne pourra cependant pas résoudre les autres problèmes qui empoisonnent la vie des agences et notamment la fameuse « caution IATA ». Actuellement, il y aurait déjà  une quinzaine d’agences de voyages billettistes sur lesquelles les foudres de l’IATA se seraient abattues pour défaut de règlement de la caution et qui seraient privées d’accès au BSP (base de données des lignes aériennes internationales) et donc incapables de vendre des billets d’avion. En matière de voyages à  l’étranger, l’affaire du budget alloué par la Banque centrale de Tunisie (lire) n’est toujours pas résolue et cette dernière campe sur sa position : elle accordera une enveloppe de 10 MD, pas un de plus. La profession elle, en revendique le triple. « La BCT reproche aux agences leur manque de citoyenneté » s’indigne Sihem Zaïem, présidente de la commission Outgoing à  la FTAV, qui rappelle que lorsque le budget de 10 MD avait été fixé en 2007, il y avait 300 agences de voyages dans le pays. Aujourd’hui, il y en a plus du double et les besoins du marché ont augmenté de manière exponentielle. Et ces agences, toutes catégories confondues, entendent bien défendre leur gagne-pain. Elles espèrent que l’administration entendra leur appel à  relâcher la pression et respecter leur dignité. A défaut, elles pourraient encore faire parler d’elles, mais autrement. C’est du moins ce que certaines laissent sous-entendre.

Hédi HAMDI

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